Chantal Julia, Manon Egnell, Pilar Galan, Morgane Fialon, Mathilde Touvier, Serge Hercberg
Sorbonne Paris Nord University, Inserm U1153, Inrae U1125, Cnam, Nutritional Epidemiology Research Team (EREN), Epidemiology and Statistics Research Center – University of Paris (CRESS), Bobigny, France
Public Health Department, Paris-Seine-Saint-Denis University Hospitals (AP-HP), Bobigny, France
Parmi les déterminants des maladies chroniques aujourd’hui les plus répandues en Europe (obésité, maladies cardiovasculaires, diabète, certains types de cancers,…), l’alimentation déséquilibrée est considérée comme l’un des principaux facteurs de risque, et surtout un déterminant sur lequel il est possible d’agir. Afin de s’attaquer au coût humain, social et économique croissant lié à l’augmentation de l’incidence de ces maladies chroniques, des politiques nutritionnelles ont été mises en place dans de nombreux pays visant à améliorer l’alimentation et l’état nutritionnel des populations. Une des principales action mise en œuvre dans ces stratégies gouvernementales est la diffusion de guides alimentaires qui relaient les recommandations nutritionnelles de santé publique visant à fournir aux consommateurs des conseils sur la consommation des principaux groupes alimentaires et promouvoir les comportements les plus favorables à la santé. Plus récemment, a été mis en avant l’intérêt de logos nutritionnels destinés à être apposés sur la face avant des emballages des aliments, qui sont aujourd’hui considérés comme des outils efficaces pour informer les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des aliments au moment de leur acte d’achat. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) recommande préférentiellement la mise en place de logos nutritionnels de type interprétatifs qui offrent aux consommateurs un moyen simple et rapide d’évaluer la teneur nutritionnelle des aliments.
Parmi les différents logos interprétatifs existants, le Nutri-Score, développé initialement en France a été également adopté en Belgique, en Espagne, en Allemagne, en Suisse, aux Pays-Bas et au Luxembourg. Le Nutri-Score est un logo synthétique, graduel, coloriel (à cinq couleurs) indiquant la qualité nutritionnelle globale des aliments évaluée sur la base d’un système de profilage nutritionnel qui prend en considération leur composition nutritionnelle. Il intègre dans son calcul la teneur en éléments considérés comme défavorables sur le plan nutritionnel, et dont la consommation devrait être limitée (énergie, sucres totaux, acides gras saturés et sodium) et, d’autre part, les éléments favorables à la consommation (fibres, protéines, fruits, légumes, légumineuses, fruits secs et huile d’olive, de colza et de noix).
Parmi les interrogations soulevées sur les étiquetages nutritionnels simplifiés et notamment sur le Nutri-Score, l’une porte spécifiquement sur leur capacité à s’aligner parfaitement avec les recommandations nutritionnelles de santé publique. Même si l’alignement du Nutri-Score semble globalement raisonnable et, même s’il peut être amélioré sur certains points spécifiques, il est peu probable qu’un alignement à 100 % soit possible. Ceci n’est pas spécifique au Nutri-Score mais est vrai pour tous les logos nutritionnels. Ceci s’explique par le fait que les recommandations nutritionnelles (telles qu’on les trouve relayées dans les guides alimentaires) et les logos nutritionnels représentent l’expression de deux types différents d’information nutritionnelle dont les principes de développement diffèrent à plusieurs titres. Pour comprendre le rôle respectif des recommandations nutritionnelles et des logos nutritionnels, ainsi que la complémentarité et la synergie entre ces deux outils de santé publique, il est indispensables de prendre en compte les différences qui existent dans leurs objectifs et la manière dont ils peuvent et doivent être coordonnés.
Quels sont les objectifs des recommandations nutritionnelles de santé publique (les guides alimentaires) ?
Les recommandations nutritionnelles de santé publique fournissent le cadre général d’une alimentation saine, qui résulte de la consommation d’une combinaison d’aliments, tant en quantité qu’en qualité. Ces recommandations fournissent aux consommateurs des conseils pratiques sur ce qui est considéré comme une alimentation favorable à la santé, en donnant des informations générales au niveau de la consommation des larges groupes d’aliments (les fruits et légumes, les légumineuses, les fruits secs, les produits laitiers, les viandes, les matières grasses ajoutées, les produits sucrés, etc.). Ces informations permettent d’aider les consommateurs à identifier les groupes alimentaires pour lesquels la consommation devrait être encouragée ou limitée. Pour certains de ces groupes alimentaires, une fréquence quantitative recommandée de consommation est fournie, par exemple, « au moins 5 fruits et légumes par jour » ; « du poisson deux fois par semaine » ; « une poignée par jour de fruits secs non salés »…. Pour d’autres, il s’agit de conseils qualitatifs, comme « limiter la consommation de sel, de sucre ou de graisses », « favoriser les céréales complètes », « privilégier les graisses végétales par rapport aux graisses animales », « limiter les aliments ultra-transformés », « consommez plutôt des aliments bruts, du fait-maison » .
Quels sont les objectifs d’un logo nutritionnel comme Nutri-Score ?
Nutri-Score a deux objectifs principaux : 1) encourager les consommateurs à faire des choix plus sains au moment de leur acte d’achats et 2) inciter les industriels de l’agro-alimentaire à reformuler leurs produits pour tendre vers des aliments moins salés, moins sucrés et moins gras, plus riches en fibres,…. Pour faciliter les choix des consommateurs, Nutri-Score vise à leur fournir une information leur permettant, sur une base relative, de comparer facilement la qualité nutritionnelle des aliments, ce qui est un point fondamental pour guider leurs choix au moment de l’achat. Nutri-Score n’invente rien. Il résume simplement sous une forme synthétique et facilement compréhensible par tous, les éléments de la composition nutritionnelle des aliments qui apparaissent sur la déclaration nutritionnelle obligatoire figurant (de façon incompréhensible) sur le dos des emballages.
Si l’objectif de Nutri-Score est de permettre aux consommateurs de comparer la qualité nutritionnelle des différents aliments, cette comparaison n’a de sens que si elle concerne des aliments que le consommateur est réellement amené à comparer au moment de leurs achats ou de leurs consommations. Là encore, il faut rappeler que Nutri-Score permet de comparer la qualité nutritionnelle :
1) des aliments appartenant à la même catégorie, comme par exemple au sein des céréales pour le petit-déjeuner, pouvoir comparer les mueslis vs les céréales chocolatées, vs les céréales fourrées au chocolat; ou au sein du groupe des biscuits, comparer les biscuits aux fruits vs ceux au chocolat; ou les lasagnes à la viande vs les lasagnes au saumon vs les lasagnes aux épinards; ou encore différents plats de pâtes, différents types de pizzas ou différents types de boissons (eau, jus de fruits, boissons aux fruits, sodas, etc.),
2) du même aliment mais proposé par différentes marques (p. ex., comparer les céréales fourrées au chocolat d’une marque à son « équivalent » d’une autre marque; ou des biscuits au chocolat de différentes marques,…),
3) des aliments appartenant à différentes catégories, à condition qu’ils soient utilisés ou consommés dans des conditions similaires (pour le petit déjeuner par exemple, ou comme entrées, ou encore comme dessert), et qui se trouvent souvent dans les mêmes rayons des supermarchés : yaourts vs crèmes de dessert ; céréales de petit déjeuner vs biscuits, pain, biscotte ou pâtisseries…
Complémentarité entre recommandations nutritionnelles de santé publique et logo nutritionnel, en tenant compte de leurs spécificités respectives
Les recommandations nutritionnelles sont faites pour aider les consommateurs à adopter une alimentation saine. S’il est possible de caractériser une alimentation comme « saine » ou « malsaine » en fonction de son association avec le risque de diverses pathologies, tels que les cancers, les maladies cardiovasculaires ou le diabète de type 2, il n’en est pas de même pour les aliments spécifiques. En effet, aucun aliment ne peut être considéré comme nuisible ou toxique en tant que tel, tout comme aucun ne peut être considérée comme une panacée universelle, même si l’on peut reconnaître que certains ont des compositions nutritionnelles plus favorables que d’autres. C’est la combinaison des groupes d’aliments au sein d’une alimentation globale qui permet de la définir saine ou malsaine. Contrairement aux recommandations nutritionnelles qui se réfèrent à des groupes génériques d’aliments et à l’alimentation globale, les logos nutritionnels évaluent la valeur nutritionnelle des aliments spécifiques. C’est pour cela que Nutri-Score ne classe pas les aliments comme étant « sains » ou « malsains » en valeur absolue. Une telle finalité pour un logo nutritionnel serait discutable puisque le caractère santé absolue d’un aliment dépend de la quantité consommée et de la fréquence de sa consommation, mais aussi de l’équilibre alimentaire global des individus (sachant que l’équilibre nutritionnel global ne se fait pas par la consommation d’un seul aliment, ni sur un repas, ni même sur une journée…).
De plus, même au sein des groupes alimentaires qui font l’objet de recommandations nutritionnelles de santé publique, les aliments spécifiques qui les constituent présentent une grande variabilité en terme de composition, particulièrement lorsqu’on considère la gamme des aliments industriels. Par exemple, le poisson peut être acheté cru, en conserve, fumé, pané, haché,… Toutes ces formes de poissons se retrouvent dans les recommandations nutritionnelles dans le groupe générique « Poissons ». Or ces formes variées de poissons ont des compositions nutritionnelles très différentes. A titre d’exemple, le saumon (comme d’autres poissons gras), selon sa forme de vente, peut ne pas contenir de sel (s’il est frais) ou jusqu’à 3 à 4 g de sel par 100 g s’il est fumé (ce qui correspond à 1/2 à 2/3 de l’apport quotidien maximal recommandé pour le sel). Le Nutri-Score permet d’objectiver ces différences de composition nutritionnelle et fournit donc une information d’intérêt: le saumon frais est classé A, le saumon en conserve classé B et le saumon fumé est D (figure 1). Cette information est particulièrement utile pour les consommateurs étant donné que les recommandations nutritionnelles incitent à manger du poisson et notamment des poissons gras sans donner plus de précisions. « Manger du saumon, du hareng ou des sardines » fait donc partie des recommandations nutritionnelles, mais ce message ne donne pas d’informations sur les différences nutritionnelles des diverses formes existantes de ces poissons. Par conséquent, le Nutri-Score est vraiment complémentaire aux recommandations nutritionnelles de santé publique. Manger des poissons est la recommandation principale. Mais Nutri-Score vient en complément car il aide les consommateurs à ajuster facilement la quantité et la fréquence de consommation de différents types de poisson en fonction de leur qualité nutritionnelle. Cette situation se retrouve dans tous les groupes alimentaires qui font l’objet des recommandations génériques.

0.1 g sel/100g 1,2 g sel /100g 3 g sel /100g |
Figure 1. Classement des différents types de saumon avec le Nutri-Score
De la même façon, au sein des groupes d’aliments dont la consommation doit être limitée conformément aux recommandations (par exemple, les chips, les desserts sucrés, les biscuits, les pizzas,…), il existe également une grande variabilité dans la composition nutritionnelle des aliments spécifiques qui en font partie, en termes de teneur en sel, graisses saturées, sucre, calories, fibres … (figure 2). Donc, même si la recommandation générique est de limiter la consommation de ces produits qui sont – pour la plupart d’entre eux – salés et/ou sucrés et/ou gras, Nutri-Score peut aider les consommateurs à identifier les produits qui présentent la composition la moins défavorable, ce qui est utile pour le consommateur.

Figure 2. Differences of nutritional quality between products from the same category
Le Nutri-Score apparait également intéressant pour montrer aux consommateurs les différences majeures qui peuvent exister dans la qualité nutritionnelle de produits alimentaire portant le même nom (par exemple entre les « pizzas au fromage », les « biscuits au chocolat », ,…), mais de marques différentes (figure 3). Même si les recommandations nutritionnelles rappellent que la consommation de ces produits (pizza, biscuits au chocolats, …. doit être globalement limitée, il est important de permettre aux consommateurs d’identifier au sein de ces aliments, la marque avec une meilleure qualité nutritionnelle. Cette objectivation par le Nutri-Score pourrait notamment encourager les entreprises à reformuler leurs produits pour s’aligner sur leurs concurrents.

Figure 3 : Différences de qualité nutritionnelle entre produits similaires de marques différentes
Une fois de plus, il faut rappeler qu’un Nutri-Score B ou C pour une pizza ou des céréales petit-déjeuner ou un biscuit ne veut pas dire que ces aliments sont considérés comme sains. Mais si les consommateurs ont décidé de manger une pizza, des céréales petit-déjeuner ou un biscuit, Nutri-Score les aide à choisir celui ou celle dont la composition est la moins défavorable (la mieux classée avec Nutri-Score).
Par rapport aux recommandations nutritionnelles, un autre point à prendre en considération concerne la promotion des aliments non transformés ou peu transformés, et notamment les produits fait-maison, et la limitation conseillée des produits ultra-transformés industriels. Toutefois, dans l’environnement alimentaire européen actuel, le temps passé à cuisiner et l’utilisation d’aliments bruts pour préparer les repas – plutôt que de mélanger des ingrédients industriels – tend à diminuer. L’analyse des tendances de l’offre alimentaire mis à disposition des consommateurs met en évidence que les aliments et les repas préparés et prêts à l’emploi constituent un marché en pleine croissance. Compte tenu de ces tendances, Nutri-Score apparaît comme une stratégie complémentaire pour aider les consommateurs à choisir, parmi les multiples aliments industriels disponibles sur le marché, ceux qui ont une meilleure qualité nutritionnelle ou ceux qui sont les moins défavorables sur le plan nutritionnel. Nutri-Score est particulièrement utile pour les populations qui ne peuvent ou ne veulent pas cuisiner à partir de produits frais par manque de temps, d’intérêt ou du fait de ressources financières insuffisantes…
Il est évident que si des consommateurs veulent consommer un sandwich ou une soupe de tomate, l’idéal est qu’ils les confectionnent eux-mêmes avec des aliments bruts et des ingrédients de bonne qualité nutritionnelle et sans additif. Mais si par manque de temps, d’envie ou de moyens, ils décident d’acheter un sandwich industriel déjà préparé ou une soupe industrielle, il est préférable qu’ils choisissent ceux de meilleure qualité nutritionnelle (ou la moins pire), ce que Nutri-Score leur permet de reconnaître !
Cohérence globale entre Nutri-Score et les recommandations nutritionnelles et pouvoir discriminant de Nutri-Score
La distribution du score qui sous-tend le calcul du Nutri-Score (FSAm-NSP), qui s’appuie lui-même sur le profil nutritionnel (Nutrient Profiling System ou NPS) établi par la UK Food Standard Agency (FSA) et modifié par le Haut Conseil de la Santé Publique français, a fait l’objet d’analyses réalisées dans plusieurs bases de données sur la composition des aliments. Une étude a été notamment réalisée dans 13 pays (France, Belgique, Espagne, Allemagne, Suisse, Italie, Royaume-Uni, Pays-Bas, Suède, Autriche, Finlande, Pologne Portugal) https://nutriscore.blog/2021/01/29/ability-of-the-front-of-pack-nutrition-label-nutri-score-to-discriminate-nutritional-quality-of-food-products-in-13-european-countries-and-consistency-with-nutritional-recommendations-austria-belgiu/
La classification par le Nutri-Score des différents groupes alimentaires montre qu’il existe une cohérence globale avec les recommandations nutritionnelles (figure 4) : la majorité des aliments contenant principalement des fruits et légumes sont classés en A ou B, alors que la majorité des produits sucrés sont classées D ou E. Cette cohérence se retrouve également au sein même des groupes d’aliments : dans le groupe des féculents, les légumineuses, les pâtes et le riz sont systématiquement mieux classés que les céréales du petit déjeuner; dans le groupe des produits laitiers, le lait et le yogourt sont mieux classés que le fromage. Pour les plats composés, il existe une grande variabilité dans la qualité nutritionnelle des produits qui rentrent dans cette catégorie. En ce qui concerne les boissons, alors que la majorité des jus de fruits sont classés C, les sodas sont E, et seule l’eau est classée A, ce qui est en conformité avec les recommandations nutritionnelles.
Pour aider les consommateurs à prendre conscience des différences de qualité nutritionnelle pouvant exister entre les aliments et permettre ainsi les comparaisons entre les aliments, il est important pour un logo nutritionnel, comme le Nutri-Score, qu’il possède un bon pouvoir discriminant, c’est-à-dire qu’il permette de caractériser un nombre suffisant de classes de Nutri-Score au sein de chaque groupe alimentaire. Les analyses des bases de données alimentaires montrent que pour tous les aliments commercialisés au sein de toutes les catégories d’aliments (pour tous les pays étudiés), la variabilité de la composition alimentaire est parfaitement bien captée par le Nutri-Score : les aliments se classent dans au moins 3 catégories du Nutri-Score pour tous les groupes alimentaires, ainsi que pour les sous-groupes d’aliments dans chaque groupe (Figure 4).

Figure 4 : Classification des différents groupes alimentaires à l’aide du Nutri-Score
Nécessité d’une stratégie de communication/éducation pour informer sur la complémentarité entre les recommandations nutritionnelles et Nutri-Score
Au total, la concordance de Nutri-Score avec les recommandations nutritionnelles de santé publique apparaît globalement cohérente pour une très grande majorité des aliments présents sur le marché alimentaire. En raison de la grande variabilité de qualité nutritionnelle au sein des catégories d’aliments à promouvoir comme de celle des catégories d’aliments à limiter, Nutri-Score fournit des informations supplémentaires pour orienter les consommateurs vers des aliments ayant une meilleure composition nutritionnelle (contenant moins de nutriments défavorables et/ou plus d’éléments favorables). Même s’il peut exister quelques erreurs de classification (qui pourront être résolues par des modifications mineures des composants de l’algorithme lors de sa mise à jour prévue au niveau européen), Nutri-Score apparaît comme un outil parfaitement complémentaire aux recommandations nutritionnelles de santé publique. Cependant, il est indispensable, pour éviter toute confusion ou erreur de compréhension, de mettre en œuvre une communication adaptée rappelant à la population la façon dont chacune de ces informations doit être utilisée. En pratique, pour les consommateurs : 1) il est conseillé de suivre les recommandations nutritionnelles pour atteindre des habitudes alimentaires globalement saines. Ces recommandations fournissent des repères sur les groupes d’aliments génériques qui doivent être promus ou limités, les fréquences de consommation de ces groupes d’aliments quand elles sont précisées, et le fait de privilégier les aliments brut, le fait-maison et réduire celles des ultra-transformés ; et ensuite 2) au sein de ces groupes, pour les aliments qui sont préemballés, il est conseillé d’utiliser le Nutri-Score pour choisir ceux qui ont une meilleure qualité nutritionnelle, dans la catégorie ou entre les marques, et ainsi adapter la quantité/fréquence de consommation des aliments.
Les recommandations nutritionnelles de santé publique sont à peu près les mêmes dans tous les pays européens (même si leurs stratégies de diffusion peuvent différer). Par ailleurs, Nutri-Score est universel et ne peut pas varier selon les pays (en particulier dans l’UE où la libre circulation des marchandises interdit les écarts dans le marché unique). Par contre, les stratégies de communication et d’éducation sur la façon d’utiliser les recommandations nutritionnelles et le Nutri-Score doivent être adaptées aux différents contextes culturels en tenant compte des spécificités des habitudes alimentaires. La communication et l’éducation sur ce point doivent mobiliser tous les acteurs concernés : structures de nutrition et de santé publique, nutritionnistes et diététistes, professionnels de la santé, enseignants, acteurs de terrain…
Bien sûr, Nutri-Score (comme tous les logos nutritionnels) n’est pas parfait à 100 %. Par exemple, comme déjà évoqué, il ne tient pas compte de la présence d’additifs ou de pesticides. Ceci est lié à l’impossibilité, compte tenu des connaissances scientifiques actuelles, de développer un indicateur synthétique couvrant toutes les dimensions santé des aliments. Mais, l’accumulation de nombreuses études épidémiologiques, cliniques et expérimentales fournit un niveau documenté et solide de preuves de l’impact sur la santé de plusieurs composants nutritionnels (nutriments/aliments). C’est le cas du sel, du sucre, des fibres alimentaires, etc., c’est-à-dire des éléments inclus dans le Nutri-Score. Pour les autres dimensions, en particulier celles se rapportant aux additifs alimentaires, aux composés néoformés ou aux contaminants (pesticides, antibiotiques, perturbateurs endocriniens, etc.), il existe des hypothèses fortes sur leur impact sur la santé, mais les niveaux de preuve sont encore limités (surtout en raison de l’absence à ce jour d’études à long terme sur l’homme). Si des additifs sont démontrés à risque pour la santé, il ne faudra pas avertir de leur présence dans les aliments mais les interdire complètement.
La recherche en santé publique et en nutrition travaille activement sur ces problématiques et apportera, sans aucun doute, des éléments supplémentaires dans les années à venir qui pourront servir à l’optimisation du Nutri-Score, une fois que le niveau de preuve suffisant aura été atteint. Mais pour le moment, il est impossible de pondérer la contribution relative de chaque dimension santé afin de fournir un score synthétique qui serait idéalement prédictif d’un niveau de risque global pour la santé. Donc, dans le cadre d’une politique de nutrition de santé publique efficace, il est important de recommander aux consommateurs de choisir des aliments avec les meilleurs Nutri-Scores, sans additifs ou en contenant le moins possible (informations fournies dans la liste des ingrédients), et de préférer les aliments non transformés (bruts) ou minimalement transformés et, si possible, pour les aliments végétaux des aliments biologiques avec un logo de certification. Des travaux sont déjà en cours pour associer un signe graphique associé au Nutri-Score permettant aux consommateurs de reconnaître si un aliment est ultra-transformé.
Bien que Nutri-Score ait des limites inhérentes à tous les logos nutritionnels, et même si certains points seront améliorés sur la base d’arguments scientifiques et de santé publique dans sa mise à jour future, il est important de rappeler que, dans sa forme actuelle, son algorithme a été validé scientifiquement. Plusieurs études de cohorte prospectives sur de très larges échantillons de population ont démontré qu’il est associé, au niveau individuel, à la survenue des événements de santé liés à la nutrition (cancers, maladies cardiovasculaires, obésité, syndrome métabolique,…). La validation du système de profilage nutritionnel qui sous-tend Nutri-Score et la démonstration de l’efficacité de son format graphique sur la qualité nutritionnelle des achats aliment aires justifient pleinement son implémentation sur les emballages des aliments en synergie avec les recommandations nutritionnelles génériques. Ceci est important, car en l’absence d’information compréhensible sur la qualité nutritionnelle des aliments, le consommateur est à la merci du marketing des entreprises alimentaires qui utilisent des stratégies différentes (publicité, évocations subtiles sur les emballages, …) afin de pousser la consommation de certains produits qui sur le plan de la santé publique devraient être limitée. De plus, la demande de plus en plus formulée par les consommateurs pour des aliments sains amène l’industrie à y répondre en inondant le marché d’aliments industriels fortement marquetés avec des allégations santé et nutritionnelles que les consommateurs peinent à évaluer de manière indépendante. Compte tenu de ces tendances, Nutri-Score apparaît comme une aide réelle pour les consommateurs dans le choix d’aliments plus favorables sur le plan nutritionnel et à la santé, au niveau de leurs points d’achat en complément des recommandations nutritionnelles.